El clandestino

Cela aurait pu être le titre d'une chanson de la Mano Negra. Une de ces musiques colorées, écrites sur un paquet de cigarettes éventré. Papier taché de Pisco et sentant le tabac local. Cela commencerait sur un continent lointain, un homme et une femme comme mille autres, enfin presque... Eux, ils sont à la recherche d'on ne sait trop quoi et l'on ne sait trop pourquoi. Un jour, ils embarquent sur un navire et traversent le Pacifique. L’océan est bleu, l'eau clémente. Profitant d'un soleil radieux, ils débarquent à Panama et visitent les écluses de ce canal mythique. La soirée, ils la passent en bonne compagnie, sur une terrasse d'un troquet. Ils savourent la fraîcheur du soir, libératrice et ressourçante. De retour à bord, ils vivent du moment présent, de ces petites choses qui font la vie. Là on leur explique qu'il y a un problème. Qu'ils sont dorénavant considérés comme clandestins par les autorités locales.

Pourquoi ? Une erreur sur un document. Un 0 a été mis à la place d'un 2. Le bateau ne compte officiellement plus de passager. Bonne nuit, l'obscurité apportera peut-être des solutions. Après quelques tours de passe-passe, la situation s'arrange. Ils retrouvent le droit chemin. Ils sont à nouveau considérés comme d'honnêtes citoyens. Honnêtes ? Mais non, personne ne l'est dans ce bas monde ! La présomption d'innocence n'étant qu'un leurre pour amadouer les foules, pour les faire marcher dans le sens qui est le « bon ». Ça, ils le découvriront dans les jours qui suivent. Débarquement à Callao, port commercialo-militaire de Lima. Il faut faire les visas. Un peu de paperasse en échange du sésame qui leur ouvrira les portes du pays. Un homme est là pour les aider. Ils montent dans une voiture et se retrouvent, quelques minutes plus tard, dans la prison de la ville. Ils ne sont pas là pour y moisir, mais pour utiliser l'ordinateur censé confirmer leurs identités. Échec, la machine ne peut se connecter. A quoi, ils ne le savent pas. Départ pour le central, le poste de police principal de la capitale. On leur dira : « No esta funcionando ! » Troisième et dernière chance : l'aéroport. La réponse, ils n'ont pas besoin de l'entendre, ils la lisent sur les visages. Le Pérou, c'est pas pour eux. Rembarquant sur leur bateau, ils comprennent ce à quoi les ordinateurs ne pouvaient se connecter : aux dossiers d'Interpol. Ne pouvant prouver qu'ils étaient innocents, ils deviennent coupables. Et des coupables, personne n'en veut. La chanson pourrait s'arrêter là, peignant un monde noir fait d'injustices où les faibles n'ont qu'à subir. Mais nos deux amoureux l'ont compris. Lutter contre le passé ne le change pas et l'avenir sera riche pour ceux qui vivent pleinement le présent. OF 19.09.13



Jeux informatiques

Addiction est assurément le mot qui définit le mieux la relation que j'entretenais avec ce monde. Sevrage est peut-être le second nom que je peux donner à notre voyage. Quoique... Je ne sais plus trop quand tout cela a commencé. Peut-être ce jour où, jeune officier, je me suis retrouvé aux portes de l'Italie. Personne n'y croyait vraiment et notre chef subissait les railleries de ses pairs. Mais jour après jour, disputant des batailles où le nombre n'était pas à notre avantage, nous avancions. Quelle leçon, pour moi, d'observer ce jeune Corse si ambitieux ! Quelle maîtrise du terrain avait cet homme, qu'aujourd'hui nous connaissons tous sous le nom de Napoléon Bonaparte ! Mon expérience ne se limite naturellement pas aux guerres napoléoniennes où je suis rapidement devenu général de plusieurs milliers de miliciens, fantassins et hussards. Plus récemment, j'ai été commandant de troupes d'élite, utilisant des armes high-tech. Des innovations technologiques que seules la peur et la guerre peuvent faire naître. C'était dans ces années fastes où notre terre était recouverte de ce minéral que l’on appelait tiberium, ces mêmes années où certains scientifiques pessimistes voyaient notre belle planète bleue vivre ses derniers instants. Grand commandant des forces du GDI, j'ai repoussé à la force de la poudre ces infâmes partisans du Nod et éradiqué le fléau vert. Pour cela, il me fallut remporter des batailles aux noms tels que « Soleil de Tiberium », « Mission Taïga », ou simplement « la Guerre du Tiberium ». Ce sont des dizaines de milliers de mes hommes que je vis périr dans ces violents assauts : réduits en cendre par une aviation impitoyable ou simplement disparaissant sous les chenilles de chars d'assaut aux dimensions incommensurables. Aujourd'hui, je pleure encore ces frères d'armes restés sur le champ de bataille. Ces hommes qui n'ont pu humer à nouveau le parfum de la liberté. 39-45, deux dates qui ont fait du jeune soldat que j'étais, l'homme que je suis. Une odeur de vomi, de fiente et d'urine envahit la barque dans laquelle j'ai été parqué avec mon unité. Deux cents mètres est la distance qu'il nous fallait parcourir sur cette plage au nom libérateur pour certains et d'horreur pour nous : Utha Beach. Plus de 8 heures d'une pluie d'acier où nous stagnerons, où la mort semblait être notre seule porte de sortie. « J day » n'aura rien à envier à cette fameuse journée où l'on m'a parachuté au-dessus de la Belgique. Opération « Market Garden » ; si la débâcle a un nom, c'est assurément celui-là. Mais l'honneur et la loyauté ne sont pas mes seuls atouts. Ayant déposé les armes, je me suis rapidement lancé en politique. Une petite ville au nom peu commun m'élira maire. Talentueux et visionnaire, je transforme cette terre inféconde en une véritable mégapole. L'urbanisme était devenu ma passion et le bien-être de mes concitoyens une priorité absolue. La gestion et les affaires m'ont également mené à la tête d'entreprises internationales où, cherchant le profit maximal, j'opérais à tous les niveaux. Collecte des matières premières, raffinage, usinage et assemblage étaient la base de mon empire commercial. Conditionnement, logistique et vente, un délice nommé dollars. Mais sot serait celui qui souhaite l'argent sans le pouvoir. C'est donc en maître du monde que j'atteins mon apogée. Diplomatie, commerce et guerre, le trio gagnant pour régner non pas sur un peuple, mais sur une civilisation.

Quel rapport y a-t-il entre un voyage à vélo et cette ancienne addiction ? Pourquoi prendre le temps de vous conter ce passé, éphémère et virtuel ? C'est que ce monde qui m'animait a su passer outre le réseau 230 volts de notre maison, qu'il a su dépasser les limites physiques de mon ordinateur. C'est dans ma tête, que les jours où le vent souffle trop fort, que la pente est trop raide, qu'une partie redémarre. Alors, à moi les conquêtes intersidérales, les défis qu'une seule vie ne suffirait à réaliser.OF 15.09.13

Infos pratiques Pacifique

Dans cette "infos pratiques" vous trouverez les informations relatives à notre traversée. La compagnie sur laquelle nous avons embarqué est la CMA CGM et notre intermédiaire est Globoship. Nous avons pu constater que le fonctionnement varie peu d'un prestataire à un autre. Les infos ci-dessous concernent uniquement les voyages en porte-containers.

Fonctionnement général: Pour embarquer sur un porte-containers, il vous faut soit transiter par une société tierce (agence de voyage spécialisée), soit passer directement par la compagnie de navigation, si elle possède un département gérant l'embarquement de passagers.

Prix et démarches administratives: Pour une traversée en porte-containers, il faut compter environ 120 dollars par jour et par personne (pas de réduction pour les chambres double). Selon les compagnies maritimes, une prolongation du trajet (tempête, avarie, ...) peut être facturée en sus. A cela peut également s'ajouter une taxe d'embarquement ou/et de débarquement suivant les ports (à payer sur place). Pour ces démarches, comptez entre 0 et 100 dollars par fois.

Dans notre situation, les vélos étaient gratuits et une moto aurait coûté 31 dollars. Côté démarches administratives, il faut savoir qu'elles sont assez longues et très fragmentées. Dans notre situation, nous sommes passés par l'agence de voyage Globoship en Suisse (www.globoship.ch / info@globoship.ch).

Il nous a fallut dans les grandes lignes :

                 Informer l'agence du pays de départ et d'arrivée, ainsi que d'une date approximative de départ.
 
                 Sélectionner le bateau qui convient, selon leurs propositions. Les en informer et attendre qu'ils obtiennent la confirmation de disponibilité par la société maritime et qu'ils nous envoient une offre relative à la demande.
 
                 Retourner l'offre signée, ainsi que divers documents s'y associant (règlement de bord, décharge en cas d'accident, confirmation de cotisation à une assurance maladie-accident-rapatriement, ...). Envoyer une copie du passeport, ainsi qu'une copie du carnet de vaccinations (fièvre jaune obligatoire pour l'Amérique du sud). Payer l'acompte qui fait office de réservation.
 
                 Retourner le certificat médical (envoyé par l'agence avec la décharge) signé au préalable par son médecin et par soi-même. Ce document doit être rempli au maximum 30 jours avant l'embarquement.
 
                 Payer le solde du ticket.
 
                 Attendre les informations relatives au jour d'embarquement.

Si à priori ces démarches peuvent paraître assez simples, elles le deviennent moins lorsque l'accès au net est restreint et que les photocopieuses et scans ne courent pas les rues. Le fait de devoir consulter son médecin traitant 30 jours avant l'embarquement reste encore une énigme dans sa faisabilité pour les voyageurs au long cours. Certaines compagnies acceptent donc qu'un médecin local (mais diplômé) remplisse le certificat médical.

Embarquement: L'embarquement vous demandera un rien de souplesse dans votre planning. Il vous faudra entrer en contact avec votre agent local 2-3 jours avant la date de départ initiale. Ceci pour les raisons suivantes : la date d'embarquement peut être avancée ou reculée (météo difficile, avaries, ...) et vous devez pouvoir embarquer dans de courts délais. Attention, un porte-containers n'attend pas! Le contrat d'embarquement spécifie ce genre de détails, ainsi que le côté financier s'y rattachant.

Débarquement durant le voyage: Il est bon de savoir qu'il n'y a pas de médecin à bord des porte-containers. Un débarquement pour raison de santé sera à votre charge. Pour les visites des villes portuaires avec escale, le débarquement dépend de plusieurs facteurs. Premièrement, le temps d'arrêt. Souvent minuté (Chine, Japon, ... ), il vous sera impossible de débarquer. Par contre, en cas de plus longues haltes (Mexique, Panama, ...), seules les lois en vigueur dans le pays et/ou la désapprobation du commandant peuvent vous empêcher de débarquer.

Il existe un système de short-pass, sorte de visa pour marin.

Si les démarches relatives à la traversée nous ont parues difficiles et contraignantes, aujourd'hui nous sommes plus qu'heureux de les avoir entreprises. Vivre sur un porte-containers est une expérience unique qui conjugue le verbe "voyager" de mille et une manières.

 

Lumière océane

Dimanche 8 septembre 2013, terre à l'horizon. Venons-nous donc de passer quinze jours en plein océan ? J’ai peine à le croire. Qu'ai-je donc fait durant tout ce temps puisqu'il me paraît n'être qu'un instant ? Pourtant l'agenda est formel.
Et lui, je le crois, plus que ma propre boussole temporelle. Boussole ou plutôt déboussole. Car sans cesse, celle-ci a été malmenée par le temps qui s'est allongé, raccourci, multiplié, distendu. Le temps... cette immensité abstraite qui nous surpasse. Qu'est-ce qu'une minute, une heure, un jour, si ce n'est un cadre créé par l'homme pour tenter de le maîtriser ? De la Corée au Mexique, nous avons dû résoudre le problème suivant : avancer dans les fuseaux horaires pour finalement se retrouver en retard sur l'heure de Greenwich. Comment donc avancer pour reculer ? La solution : des journées de vingt-trois heures et un jour à double. Ainsi avons-nous vécu deux fois le jeudi 29 août. Notre année 2013 sera donc composée de 366 jours. Quoique... les heures perdues depuis le début de notre voyage ne compensent-elles pas cette double-journée ? En fin de compte, l'esprit s'embrouille et le corps s'y perd. Quel jour sommes-nous ?

Finalement cela importe peu, l'agenda n'est guère nécessaire car les jours se ressemblent à s'y méprendre. Ici, les marins travaillent sept jours sur sept. Seul le dimanche ose une petite variante dans le programme routinier et donne à la semaine un point de repère : croissants à déjeuner et pause plus longue à midi.

Pour notre part, nous nous laissons voguer au fil des jours, sans penser au-delà de ce que nous allons faire l'heure suivante. Bouquiner, écrire ou regarder un film ? Faire une heure de vélo, aller à la piscine ou se défier au ping-pong ? Faire la sieste ou se délecter du paysage sur une chaise longue au soleil ? Le choix d'activités est vaste et ce sont bien là les questions existentielles que l'on se pose chaque jour. Heureusement, les repas sont là pour structurer nos journées et éviter que l'on ne se perde dans la contemplation des vagues ou l'addiction cinématographique.

Au-delà d'un cadre journalier, les repas nous offrent des moments de réel plaisir et de saveurs. Le cuisinier est français et sait faire honneur à son pays dans les plats qu'il prépare. Cette nationalité se distingue au sein même des traditions maritimes durement conservées : ainsi nous sommes servis à table par un maître d'hôtel, nos repas se déclinent en trois plats, un plateau de fromages nous est proposé le soir et le vin ne fait jamais défaut. Roquefort AOC, baguette croustillante, fromage de chèvre, Nesquik, pommes croquantes, coquillettes au beurre, menthe fraîche... Après quelques dix-sept mois d'absence de notre palais, ces produits éclatent à nos papilles comme un bouquet de fleurs multicolores. France, Suisse, Slovénie, Espagne, Mexique, Chine... les produits proviennent de tous horizons. Et si cela est possible, c'est bien au moyen de cargos comme le nôtre, qui, de leur marche lente et régulière, estompent le contour des frontières en conduisant leurs quelques 8’000 containers de part et d'autre d'Asie et d'Amérique.

Notre navire s'appelle La Traviata. A son bord, trente-trois marins. Ils sont français, roumains ou indiens et portent le nom de commandant, bosco, peintre, chef mécanicien, maître électricien, timonier, matelot, chef cuisinier, tourneur... Grâce à leur patience et à leurs partages, nous découvrons, jour après jour, les multiples facettes de cet univers marin.
Les jours passent, l'océan nous encercle de son bleu profond, toujours et encore et la faune marine nous nargue. Elle est là, nous le savons, et pourtant elle nous échappe. Et puis, un jour :

« Aline, là, regarde ! Vite !
- Quoi, quoi, où ?
- Vite, ils passent de l'autre côté du bateau !
Et nous de piquer un sprint effréné pour atteindre le ponton à tribord.
- Wouah, regarde, là ! et là, juste devant !
- Oh là là, c'est fou ! C'est fou ! »

Vingt, peut-être bien trente dauphins jaillissent des eaux. Seigneurs des mers, ils n'ont que faire d'un gros navire comme le nôtre si ce n'est de profiter de ses vagues et d'en faire leur terrain de jeux. Deux éberlués les regardent, s'extasient, les photographient. Peu leur importe. Ils jouent et c'est tout. Ils jouent tant que les vagues les emportent, jusqu'à ce que l'eau devienne calme et ennuyeuse. Alors la partie est terminée, ils disparaissent sous les flots, ne laissant derrière eux qu'un instant d'une rare intensité et une impression de mirage. Tant d'émotions puis le calme soudain. Aurais-je rêvé ? C'est allé si vite... Je voudrais revenir en arrière et revoir la scène, encore et encore, pour admirer chaque saut, chaque pirouette, n'en louper aucune, se laisser fasciner, encore. Une prochaine fois, peut-être. Mais nous pouvons désormais déposer, dans notre boîte à souvenirs, ces quelques instants enchanteurs. Ils rejoignent ceux des tortues marines et des incroyables poissons volants. Et puis, au loin, tout au loin et un peu flou, celui des cachalots et des baleines. 

Mais la boîte est encore loin de se refermer; le voyage n'est pas terminé...AG 08.09.13


Une opérette dans le Pacifique

Port de Busan, Corée

Longueur : 340 mètres

Le pont avant

Départ de Yokohama

Un rien de mécanique

Felix, notre bosco

Notre chambre cabine

Grillades au pont E

Pour chaque port un pilote

Amérique centrale - Amérique du sud : un pont

Manoeuvre à Panama

Pélican

Notre porte-containers

Ecluses du canal de Panama

Une soirée à Panama en compagnie du commandant et du chef cuisinier

Phrase philosophique et pensée de voyage

« Il y a peut-être cent façons de mourir, mais il existe mille manières de vivre. » Olivier 

Guidons d'or et Pédale de plomb


Mesdames et Messieurs,

C'est avec un immense plaisir que je vous accompagnerai dans cette première et dernière remise de prix euro-asiatique. Moins connue que la cérémonie des Oscars mais ô combien plus authentique, je vous prie de bien vouloir prendre place pour l'unique attribution des Guidons d'or et de la non moins fameuse Pédale de plomb. Vous l'aurez assurément compris, les Guidons d'or sont là pour récompenser les plus méritants et la sinistre Pédale de plomb reviendra à qui de droit. C'est donc au travers de différentes catégories, que seront évalués les participants. Le jury étant composé de mon unique personne, c'est avec fierté que je peux vous affirmer que tous les verdicts ont été rendus à l'unanimité. Objectivité et passion ont été les maîtres mots de plus de seize mois de réflexions acharnées. Mais revenons à l'essentiel, à l'essence même de ce concours : la remise des prix.

Catégorie paysages
Si certaines catégories ont nécessité bien des nuits blanches pour déterminer le lauréat, le vainceur de cette catégorie s'est révélée être une évidence pour le jury. Magnifiques, impressionnantes, majestueuses, ce sont les chaînes des Himals, plus connues sous le nom Himalaya qui remportent le premier Guidon d'or. Ce lieu, comme trop peu souvent, est à la « hauteur » de sa renommée. Si la beauté a un visage, c'est assurément celui de ces montagnes.

Catégorie repas
De la bonne bouffe, il y en a presque partout sur cette planète. Surtout dans nos rêves ! Pas évident de s'arrêter sur un type de nourriture qui serait meilleur que les autres. Ceci pour deux raisons. Premièrement, mes goûts personnels fausseraient l'évaluation. Deuxièmement, mon odorat et par conséquence une partie de mon goût, se balade entre Aigle et le Col de la Croix. C'est donc sous un angle plus large - que la simple assiette - que je souhaite aborder cette thématique. Que serait un plat s'il n'était partagé en bonne compagnie ? Que serait une bonne platée si elle n'était servie avec le sourire ? A ce stade de la compétition, départager les potentiels lauréats reste une tâche ardue. Nombre de participants peuvent prétendre à la première place. Simplicité de l'Arménie, abondance de l'Iran, épices de l'Inde, variété de la Chine, curiosité de la Corée... Finalement, le second Guidon d'or ira à la Géorgie, pays où les repas de fête riment réellement avec festivités et où viandes, fromages et boissons sont en quantités égales à la générosité de ce peuple.

Catégorie peuple
Ici, peu de surprise. C'est avec énormément de plaisir que j'accorde le troisième Guidon d'or au vainqueur de ce concours bi-continental. J’ai nommé : le peuple iranien. Son arme secrète, pour ne pas dire son arme de construction massive : l'hospitalité. Mais n'allez pas croire que les autres participants restent sur la touche ! Loin de moi cette idée. L'hospitalité, la générosité, la bienveillance sont des clés que les peuples du monde possèdent et savent utiliser.

Catégorie bonheur en boîte
Pour ce Guidon d'or, aucun pays n'a pu rivaliser avec ces vainqueurs. Aucune ethnie et pas plus de peuples ne seront au rang des gagnants. Non, les véritables vainqueurs se trouvent, fort heureusement, un peu partout sur notre planète. On y prête que rarement attention et on en parle que trop brièvement dans nos journaux. C'est aux enfants qui bordent les routes que je souhaite attribuer ce quatrième prix. A ces enfants qui savent, par leurs sourires, illuminer une journée de brouillard...

Catégorie notre équipe
Soyons honnêtes, avais-je ne serait-ce qu'une chance de remporter ce Guidon d'or ? Tant de simplicité, de douceur, d'écoute et d'empathie réunies en une seule personne. A cela vous ajoutez la facilité à communiquer dans n'importe quelle langue, à supporter la chaleur, à attaquer les démarches administratives avec entrain et j'en passe. Bon d'accord, je porte plus de bagages qu'elle. Mais une mule ferait pareil ! C'est donc sans conteste Aline qui remporte le Guidon d'or de cette catégorie.

Catégorie inattendu
Dans cette dernière catégorie, ajoutée en « cours de route », je souhaite attribuer un Guidon d'or à ce berger chinois qui a tant d'affection pour ses brebis. Bravo et surtout beaucoup de plaisir !


Mesdames et Messieurs, la remise des prix touche à sa fin. Il ne nous reste plus qu'à remettre la Pédale de plomb, ainsi qu’à vous souhaiter une excellente fin de soirée. Dans cette catégorie, nous avons donc LE plus médiocre, LE plus lamentable, pour ne pas dire LE plus infect... le dentifrice népalais. Rougeâtre, il a un goût poivré difficile à apprécier aux alentours de 7 heures du matin. Et rien de moins étonnant que de ne pas souhaiter s'endormir avec une haleine épicées. On a eu beau essayer de lui trouver des avantages, des utilisations secondaires tels que anti-moustiques, crème solaire, sauce alimentaire… rien à faire. A fortiori, il n'en a malheureusement aucune. A vous les producteurs de cette répugnante pâte à dents, si votre objectif est d'améliorer l'hygiène buccale du pays, ce qui ne serait pas un mal, commencez par améliorer votre produit. Goût menthe serait peut-être un bon début... OF 03.09.13

Correspondance


Chère Famille,

Permettez-moi de vous voler quelques minutes de votre vie pour vous raconter un fragment de la mienne. Pour ces quelques lignes, j'ai échangé, avec un certain plaisir, ma vieille plume de cyclo-voyageur contre celle d'une mouette distraite. Volatile un peu pataud qui, à son retour dans la brise, m'offrit ce cadeau. C'est en longeant les côtes du Pays du Soleil Levant que l'envie de vous écrire m'est venue. Quoi de plus inspirant que les eaux bleues du Pacifique ? Comme un enfant devant un cadeau, mes sentiments se mêlent : excitation, désir, fascination... Mes yeux sont grand ouverts, mais n'arrivent pas à tout voir, à tout avaler, comme mon appétit le souhaite. Cela fait maintenant un peu plus d'un jour que nous avons embarqué sur la Traviata et déjà le parfum de l'aventure se fait sentir.

Mais revenons à terre, sur ce sol asiatique qui nous a hébergés le temps de deux printemps. Je vous éviterai le trop habituel résumé de notre périple mais me glisserai dans la douceur des sentiments que l'on rencontre sur les routes et les pistes de ce continent. Corée du Sud, tu as été le dernier pays d'Asie que nos pneus ont foulé, le dernier pays à nous offrir l'hospitalité. Difficile de te quitter. Tant de souvenirs, d'expériences que l'on a partagés avec Toi, tout comme avec tes « frères » de l'Est ! Une envie de pleurer me gagne, la morosité m'ayant déjà envahi la veille. Est-ce une page qui se termine ou une qui commence ? Qu'importe !

Ecrire encore et encore entre les lignes. Ne pas lâcher cette plume qui nous a déjà tracé une si belle aventure. Mais le temps passe, les heures s'effilochent comme un drapeau au vent. Il faut se résoudre, accepter la fragilité d'une journée, notre impuissance à la rallonger. Peut-être est-ce justement dans l'éphémère que réside la beauté du voyage ? Ne peignons pas non plus tout en blanc. Notre voyage euro-asiatique a eu son lot d'orages, assombrissant notre horizon, le ramenant à cette couleur unique qu'est le noir. Colères, impuissance, peurs, mélancolie, tristesse ont été les nuages de notre route. Qu'ils soient du pendant ou de l'avant notre départ. Comment ne pas se rappeler, lorsque l'on aperçoit un chat « dormant » sur le bitume. Comment ne pas se rappeler, lorsque l'Histoire est à chaque coin de rue. Comment ne pas pleurer, quand deux continents nous séparent des gens que l'on aime.

Mais le temps est un bon professeur. Si trop souvent il est contraint d'écrire en blanc sur un tableau noir, il nous a appris à apprécier le gris. Gris, qu'il faut prendre le temps de déchiffrer. De réduire comme on le ferait avec un bouillon pour n’en garder que le meilleur. La boucle est donc bouclée. Le temps qui nous invite à le prendre et peut-être même à le comprendre.

Si le soleil transformait le pont en fournaise, au début de cette lettre, en cet instant, il nous offre un dernier baiser avant de nous abandonner à l'obscurité. Orange sera la couleur qu'il a choisie pour nous dire au revoir. Peut-être un peu trop présomptueux, c'est avec toutes les couleurs de l'arc-en-ciel que je vous fais mes adieux. Le bleu pour l'envie, le rouge pour la vie. Le vert pour l'espoir, le jaune de se revoir. Et pour que cet arc, tout comme notre voyage, soit complet, j'y ajouterai un rien de violet.

Portez-vous bien et gros bisous à vous tous.
Olivier et naturellement Aline


OF 28.08.13