Il est 18 heures, le jour décline, je suis
assise sur mon balcon. Olivier est au lit, malade, il ne me reste qu'à
patienter. Première pensée : je ne vais quand même pas rester là à ne rien
faire ! Mais pourquoi pas après tout ? Simplement être là. Et observer. Alors,
petit à petit, un détail capte mon attention, puis un autre et le tableau
devient théâtre.
Face à moi, en contre-bas, une cour intérieure
dessinée par une succession de petites échoppes. Derrière elles la route. En
fond sonore, les klaxons, rien de bien surprenant. Un homme se retire de son échoppe
et se retrouve face à mon balcon. A l'abri des regards de la rue, il urine. Je
baisse les yeux, lui les lève. La seule personne gênée dans l'histoire, c'est
moi. Et puis un autre apparaît, même scénario. Ainsi ils se succèdent. A ma
droite, un poteau électrique et des fils qui s'en échappent de toutes parts.
Deux petits écureuils rayés jouent aux funambules, tantôt courant sur le fil,
tantôt suspendus au-dessous. La télé dans notre chambre diffuse l'Age de glace.
Je ne peux m'empêcher de sourire. Spectacle apprécié également des oiseaux
exotiques au corps rond et à la queue longue, perchés non loin. Puis une vache
traverse la cour d'un pas nonchalant. Tantôt terrain de jeux pour six petits
chiots qui couratent entre ses pattes, tantôt taxi pour aigrettes paresseuses.
La vache hésite entre ingurgiter un sac poubelle et un paquet de chips. Il faut
avouer qu'elle n'a que l'embarras du choix. Il y a bien un petit feu, là, un
peu plus loin, qui tente maladroitement d'éliminer quelques déchets. Mais à
quoi bon ? Ne reste de son existence qu'une odeur envahissante et un tas de
cendres au milieu de la mer de déchets impassibles. Pendant tout ce temps, les
hommes continuent leur valse. Ah, voilà, les chiots ont retrouvé leur maman
biologique. Quelques jappements, puis celle-ci s'en va, suivie de sa progéniture
trottinant à la queue leu-leu.
Sortie de scène.
Changement de décor.
La route. Un klaxon plus soutenu attire mon
attention, un gros camion rouge passe, débordant de cannes à sucre. Au-dessus d’elles
se tient en équilibre une dizaine de passagers. Les rickshaws sont alignés au
bord de la route, ils attendent les clients. Et des vaches, encore elles ! Cette
fois au milieu du carrefour mais toujours nonchalantes. Elles sont reines ici et
personne ne vient les contrarier.
Et puis commence la danse lumineuse des
phares.
La nuit tombe.
La vie du village continue. Je me retire.
Baisser de rideau.
AG 19.12.12
De toute évidence l'Inde t'inspire. Beau texte bravo Aline ! Danièle a dit qu'elle l'a dégusté.
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