De Pilibhit à Lumbini

Pour peu, nous aurions loupé la douane Inde-Népal. Du côté de l'Inde, un homme semblable aux autres nous appelle et nous fait signe de nous arrêter. C'est l'employé de l'office de l'immigration. Nous nous asseyons dans une petite cahute sans prétention. Avant de partir, il nous confie : « Dans un kilomètre, sur votre gauche, vous trouverez l'office népalais. » Sans cette information, nous serions passés tout droit. Voyant en nous le travail qui lui incombe, l'employé népalais opère une trêve à sa sieste et nous invite à son bureau. « Vous voulez un visa de trois mois ? » « Oui, s'il vous plaît, Monsieur. » « OK. » Et voilà, c'est fait. Plus facile que d'aller acheter nos légumes au marché.
Nous empruntons l’unique route qui traverse le pays pour nous diriger vers l'Est. Celle-ci tient plus du chemin de campagne suisse que de l'autoroute bondée indienne. Nous croyions d'abord avoir atterri dans un monde sans voiture, ni bus, ni car. Nous apprendrons par la suite que nous sommes entrés au Népal lors de la période de grêve nationale pour obtenir la baisse du prix du carburant.
Notre route fut aussi celle de Stefan et Petra, un couple germano-suisse-allemand à vélo. Ainsi, nous passerons une dizaine de jours ensemble à partager notre routine quotidienne, nos repas, nos projets et nos expériences. C'est toujours avec un grand amusement que nous découvrons le matériel d'autres cyclo-voyageurs. La plupart du temps, nous constatons que les similitudes sont nombreuses. Ensemble, nous passerons une journée entière à scruter les berges des rivières, à observer les fourrés, à écouter le bruit des branches et du bois mort, à attendre... Ceci dans le but de le voir, lui, le grand, le redouté et le désiré : Sir Tiger. Ma fois, pas de chance, il nous échappe de peu. Peut-être au plus grand plaisir de notre guide, plus peureux que téméraire. Nous nous consolerons avec deux crocodiles, une floppée de cervidés, des éléphants au travail et un énorme python. Le clou du spectacle restera néanmoins ma chute spectaculaire dans la rivière. Allez, un moment de honte, c'est vite passé !
Puisque nous abordons le sujet de la honte... Allez, une petite anecdote rien que pour vous ! Un beau matin, les militaires d'un check point nous arrêtent. Nous sommes habitués à ces postes de contrôles népalais, tant il y en a. Mais pour une fois, ce n'est pas avec un grand sourire qu'ils nous laissent passer. Nous devons montrer patte blanche, puis nous asseoir et attendre. De toute évidence, il y a un problème. Lequel, on n’en sait trop rien. Nous nous surprenons déjà à imaginer toutes sortes de scénarios possibles. Et voilà qu'il nous faut retourner au poste-frontière où nous sommes entrés dans le pays, il y a deux semaines. Il n'en est pas question. Je veux quelqu'un qui m'explique la situation en anglais sinon je ne bouge pas. Un gradé arrive, prend nos passeports, repart. C'est alors qu'un policier népalais parlant un peu l'anglais arrive. Je lui bondis presque dessus en lui demandant des explications.
« Le problème, nous dit-il, est que vous ne pouvez pas aller en Inde.
- ça tombe bien, nous n'avons aucune envie d'y retourner. Nous voulons aller à Lumbini.
- Oui, Madame, mais vous êtes en Inde ici. »
Les rouages se mettent péniblement en marche dans nos cervelles et soudain la lumière apparaît.
« Nous sommes en Inde ? Vous voulez dire que les militaires ici présents sont Indiens ?
- Oui m’sieur-dame.
- Mais comment est-ce possible ?
- Eh bien vous avez pris plein sud à Tauliahwa au lieu de prendre plein est. »
Oh, la honte ! Après moult courbettes et excuses pour le dérangement, sourires gênés jusqu'aux oreilles et fou rire au bord des lèvres, nous nous éclipsons... et retournons au Népal.
Ceci étant dit, le Népal nous permet de retrouver nos habitudes d'antan et un certain équilibre. Se lever aux premiers rayons du soleil, plier notre campement, rouler sans redouter les gens, remplir nos vaches à eau aux pompes des villages, s'arrêter pour déguster un thé, choisir son lieu de camping en n'ayant que l'embarras du choix... Simplement aimer à nouveau voyager.
Déjà, nous apercevons au loin les premiers sommets enneigés. Déjà, ils nous font rêver. Mais pour l'heure, nous nous sommes arrêtés dans un lieu hors du commun. Lumbini, là où le Bouddha serait né et où les communautés bouddhistes de différentes nations ont fait construire des temples aux allures plus ou moins extravagantes. C'est au temple coréen que nous avons trouvé gîte, couvert et tranquilité. Trois jours aux allures de colonies de vacances. La lessive pend à tous les balcons, les repas sont servis lorsque la cloche a sonné et nous dormons dans des dortoirs où hommes et femmes sont séparés. Ensuite nous reprendrons la route, direction Katmandou. AG 03.03.13 

A 2 km de notre campement...

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