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Ensemble. Sept jours sur sept. Vingt-quatre heures sur vingt-quatre ! Semaine après semaine !! Mois après mois !!! Ça donne quoi tout ça ? De longs monologues intérieurs, faute de sujet de discussion ? La découverte malheureuse de défauts insoupçonnés ? Une liste sans fin de compromis réciproques ? 
Pour la question des sujets de discussion, vous vous en seriez doutés, avec Olivier, impossible de tarir la source. Et l'avantage est que lorsque l'on a fait le tour des récits, on prend les mêmes et on recommence. Ce qui donne parfois :
«  Eh Aline, tu sais quoi, ce truc, là, ça me fait penser à ...
- A quand tu étais en-Allemagne-avec-ton-frère-et-que-vous-êtes-restés-des-heures-dans-la-mine-et-avez-fait-flipper-la-gérante-du-camping ?
- Ah ben mince alors, je te l'ai déjà racontée ?
- Mmmmm !
- Et alors, celle où...
- Où un Malgache-s'est-fait-passer-pour-ton-guide-et-a-voulu-te-faire-payer-sa-note-d'hôtel ? Allez, raconte-la moi quand même, celle-là, je l'aime bien. »
Il y a donc les histoires du passé, de nos passés respectifs et puis de notre passé commun. Celles que l'on connaît tous les deux mais dont l'évocation fait tant de bien. Et puis celles que l'on a oubliées et qui ressurgissent à l'appel du quotidien. Ensuite, il y a le présent qui ne cesse de courir frénétiquement entre nos sens, notre esprit et nos mots. Ce présent si foisonnant, ce présent si bousculant. A deux, on essaie de le déchiffrer et de l'apprivoiser. Et puis, il y a le futur. Si le passé se confine à nos souvenirs, le présent à ce que l'on vit, le futur n'a de limite que notre imagination. Et quoi de plus fertile pour l'esprit que les heures consacrées à rouler ? Alors tout y passe : le court terme, les projets pour notre retour et ceux pour plus tard. « Hé dis, si on n’a qu'un mois de visa pour la Chine, on fait comment ? » « Et puis le potager, on le fera plutôt vers le cabanon ou sous le pommier ? » « Quoi, tu veux aussi des lapins ? En plus des abeilles, des moutons et des poules ? »
Puis, venons-en à ces facettes cachées que seule une vie commune pérenne peut révéler chez l'autre. Dire que je n'en dénombre aucune serait mentir car l'unicité d'un tel voyage nous oblige à nous aventurer sur des terrains jusque-là encore inexplorés. La gestion de la soif, l'accumulation de fatigue, l'omniprésence des regards portés sur soi, le stress sonore... Dans de telles situations, mes paroles et leur mélodie parfois échappent à mon contrôle, dérapent, dissonent et atterrissent sur Olivier. Lui, par contre, devient plus virulent avec les gens qui nous entourent. Ces comportements, on a appris à les connaître. Ainsi Olivier ne surenchérit pas mes propos mais me débriefe alors que, pour ma part, je prends le relais dans les relations publiques.
Si l'on dit communément que l'union fait la force, le quotidien nous conjugue cette devise en un poème personnel. Voilà que l'on se rend compte que le bât ne blesse pas aux mêmes endroits et lorsque l'un flanche, l'autre tient le cap et sert de tuteur. L'un est malade, l'autre est là pour penser. L'un est à bout, l'autre a retrouvé suffisamment d'énergie pour deux. Et lorsque certaines situations nous touchent tous les deux, nous n’en devenons que plus unis. Alors, plutôt que de forcer les compromis, nos différences nous complètent. Olivier répare ou entretient le matériel lorsque j'aurais tendance à bâcher ; je m'occupe des négociations avec les hôteliers alors qu'Olivier est allergique à ces palabres.  
Mmmm, ce tableau semble presque trop doré. J'y cherche un peu d'ombre mais décidément n'en vois pas. Alors laissons-le ainsi et faisons en sorte que le temps conserve précieusement les couleurs de cette œuvre. AG 07.02.13   

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